samedi 11 juillet 2015

Du Pain, Du Vin, Du Bergecrac

Cher M. Brun,

Cette année tu avais pris cette décision qui nous fit tant mal à l'âme mais que nous respectons, tu avais décidé de lâcher ton rôle de cadreur dans notre roadmouvigne quasi-annuel et pourtant, le cadrage, dès que bacchus s'emmêle les grappes, tudieu que c'est important !

Nous voilà donc partis (ma pomme, JJ et Eugénie) pour la Gascogne la plus exotique pour nous, gens du Sud du Sud, et pourtant si en odeur de multitude grâce notamment à Edmond le Rostand, j'ai nommé Bergerac.
Piqué de quelques nuages, avec une légère ventole pour les bousculer, le ciel était le plus délectable des compagnons faisant presque s'éparpiller ton absence. On ne t'oubliait pourtant pas puisque nous tombâmes en arrêt du côté d'une aire de toute beauté qui pourrait à merveille accueillir la confrérie de campinguecareux dont tu fais partie et qui, si je ne m'abuse, peut se vanter d'avoir toujours une roue d'avance sur les autres...J'me comprends.
C'est après quelques vicissitudes de parcours que nous débarquâmes chez Grégoire Rousseau à Garsac-de-Curson.

Le vigneron t'aurait enchanté ( il en fut de même pour nous autres) avec son aplomb bien trempé mais jamais arrogant, simple, proche d'une terre qu'il aime et donne envie d'aimer.

De beaux merlots...


...cabernets...


...quelques ares de sémillon...


...et bientôt de sauvignon...


Tout ce beau monde croît ici avec opulence, santé, vie, plaisir et qualité.


Les vestiges d'un esclavage chimique perpétué par les anciens propriétaires des rangs de vigne sont encore là mais anecdotiques...


...Grégoire passant à la refertilisation des sols avec conviction et par là-même de 4 à 9 hectares. Certains rangs sont longs comme des jours sans miche et on imagine le travail. Grégoire, lui, ne l'imagine pas, ses mains en parlent, le concrétisent.

La dégustation fut large, sous l'arbre, en mode pow pow d'amateurs de vins d'vie et de chère à canons de la maison Laguerre de Pessac et dont tu connais les tenants (jambonneau, boudin, grenier médocain, gratton, magret séché, fromages...) et les aboutissants ( miam !).


Toutes les cuvées, "Lilas", "Tombé du ciel" (en 2013 Grégoire a tout perdu because la grêle et il a trouvé des raisins chez ses amis), "Zeste de Coquelicot" en rouge, puis "Sac de billes", en pétillant naturel, ont chamarré nos gosiers et posé du plaisir dans nos papilles rendues à la palette de l'instant, discussion qui roule, heure qui tourne et nonobstant, on a l'impression que c'est un suspens qu'on vient de vivre. Tu connais cela aussi bien que nous.
Après avoir mis au coffre quelques dives qui nous seront précieuses pour la paella campera dominicale ( ah les cagouilles d'Eugénie, l'arroz bomba de JJ, le bouillon de mézigue, le lapin fermier qui trottait encore dans la paella) nous filâmes là où chacun rêve un jour d'arriver. A Pomport. Chez Barouillet.


Comme, à l'instar de Sébastien Barrier, il faut toujours savoir qui nous buvons, je te présente le binôme qui nous accueillit dans un hameau où tout semble converger vers la vigne et ses bienfaits. Aux manettes, mais issu de trois générations de vignerons, Vincent Alexis escortée joliment par sa compagne Margaux. Ici tout respire la solidité, l'histoire, le terroir accompli.


...


40 hectares et tout en "biody" ! Ce qui semble gageure est vite confirmé sur le terrain : les herbes sont belles, les ceps pétent la santé, la fleur est guillerette, les sols à la fête, la faune itou. Y'a dl'a joie de vivre.


Impeccable. Au chai, Alexis est précis. Mais sur la base de cette solidité héritée et bien intégrée il a décidé de monter un projet où la recherche, le tâtonnement, la curiosité s'allient au plaisir d'aller plus loin ou ailleurs. Il y a là dans une cuve un blanc qu'il travaille et qu'il chérit. On goûte. C'est grand, c'est parfait pour la salinité de produits dont on trouve les traces dans les schistes fossiles à l'entour, huîtres, moules, bigorneaux, coques, palourdes, coquinas... plus loin des petits totems orangés et ovoïdes accueillent les dernières élucubrations du domaine Barouillet. C'est une belle tentative d'Alexis de travailler ses raisins autrement tout en les respectant au maximum. C'est propre, c'est maîtrisé. Le grain de folie c'est lui qui l'amène et ça, ça vaut toutes les levures exogènes du monde, les renvoie même aux manipulations dépassées, ringardes, sans avenir. L'expérience des oenologies du futur peut se vivre à travers seulement du raisin et encore du raisin, sain, naturel.

On a tout goûté, tu nous connais...


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...ah ! Les AOP aussi actives que le NKVD c'est chouette !...


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...c'était quand la dernière fois que tu as goûté de si beaux "Pécharmant" ?...


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...


...


...et toi qui a le bec sucré tu aurais sans nul doute succombé à cet "Apicula", sucré, certes, mais jamais lourd, très frais, un rien oxydé, superbe !


Je devais cracher mais j'ai eu une pensée pour toi. Il fallait que j'aille jusqu'au bout pour te raconter le plaisir du vin qui finit jusque dans nos plus petites cellules, en molécules d'ivresse pour donner le tournis à nos rigidités, nos petitesses, nos pensées étriquées. Il fallait que tel Cyrano nous emportassions "malgré nous quelque chose sans un pli, sans une tache, du panache". Ce fut fait et ce panache que les vignerons nous ont offert je le partage en te dédiant ces quelques lignes, ami. Puisse l'an qui vient te voir rejoindre notre corps de balades.

Bien à toi.

PS :  Tu as aussi manqué la salade de premières tomates de Marmande...


...la paëlla "campera" citée plus haut, l'unique, la vraie...


...et la sieste.


Domaine "Coquelicot" : ici
Domaine "Barrouillet" : ici 

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