dimanche 6 janvier 2013

Lettres à soif (14)

Minuit. Eugénie n'est pas là. Elle aurait dû venir. Mais bon, les affres du quotidien. Il faut quand même que je lui trouve des étrennes...

En attendant, la Puerta del Sol est de mise avec ses 12 grains de raisin à gober en guise de carillon collectif. Comme on est sur les ondes un peu avant le premier cuarto, se distingue la trille de fanfreluche qui vibrionne gracieusement dans la gorge de la commis de service pour TVE. J'imagine la peau de ses épaules dégagées, le Codorniu dans ses yeux qui fait glisser les balivernes.
Un bruit de foule presse sa prose.
Là où on s'indignait, on piétine. Le retour au réel c'est dans peu pourtant, mais ce sont toujours des temps tels celui-ci, ces suspensions au bord de quelque chose qui font penser à l'éternité. Comme les nano secondes avant de mettre son nez dans un verre de vin.

"Atencion, senoras y senores ! Empezamos ! ...dong...uno...dong...dos... "

Il n'y a pas à dire, croquer cette matière première apporte une belle façon de passer le gué à qui se dit amateur de "grand soif", identique à celle qui affleure si bien dans le titre de l'essai de Pascal Commère sur André Frénaud et qui me donne désir soudain de relire quelque chose de lui, de Frénaud, un texte de circonstance par exemple :

" C'est aujourd'hui ! Nous le partageons en un banquet,
Sur de hautes tables avec des litres.
Le monde est en liesse, buvons et croyons !

Je bois à la joie du peuple, au droit de l'Homme
De croire à la joie au moins une fois l'an.
A l'iris tricolore de l'oeil apparaissant
Entre les grandes paupières de l'angoisse.
A la douceur précaire, à l'illusion de l'Amour. "

(in "Soleil irréductible" / Editions Gallimard)

Du coup, c'est un vrai plaisir de savoir que vous allez réciter, Chère Eugénie, ce cadeau du poète qui sera aussi le mien, en offrant à tremper votre première lèvre d'ivresse dans un beau ballon de Bourgueil, du Domaine du Bel Air, judicieusement baptisé "Jour de Soif"...


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A l'An qui vient !

3 commentaires:

  1. putain, ludo, du bourgueil!

    gracias amigo!

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  2. c'est aussi un regalo de reyes pa' ti amigo, je sais que tu aimes ces vins-là.abrazo.

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  3. Comme ça me parle ce rituel de las uvas de la suerte, toute la ville se concentre sur la bien re-nommée Plaza de la Constitucion à communier dans l'alegria.
    Question démonstration ostentatoire de fe les Espagnols sont champions toute catégorie.
    Finalement, c'est peut-être ce qu'ils font de mieux avec leurs raisins...

    Si vous avez des huevas de mujol, de atun ou de maraca en stock, je vous invite à participer à un crossover de recettes avec cet ingrédient. Il n'y aura aucun cadeau à gagner, c'est juste pour le plaisir et le bon goût méditerranéen.

    Nos vemos

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